La fumeuse

la fumeuse

Post n°72 pubblicato il 02 Marzo 2009 da viajera67

 Lima, junio del 2006.

La fumeuse

La première fois que je me suis allumée une cigarette, j’avais trente et un ans et je vivais à Madrid. C’était un jour de soleil, et je me promenais avec ma petite amie, qu’était espagnole, dans le quartier latin. Nous sommes allées dans une cafétéria pour prendre un café et pour parler de nous. Elle aimait beaucoup fumer, et m’a demandé : « tu as du feu ? ». À cette époque, je ne fumais pas, mais j’adorais lui allumer ses cigarettes, parce que je pouvais m’approcher de son visage, de ses yeux verts ; je pouvais lui sourire, et lui dire quelques choses à voix basse. J’avais acheté un briquet rouge, et je le portais toujours dans ma poche droite. Cet après-midi, elle me regardait et me souriait plus que les autres jours, et quand elle m’a demandé du feu c’était comme si elle m’invitait chez elle. Je la désirais beaucoup, j’avais envie de passer un après-midi chez elle ou chez moi, et alors je lui ai pris la cigarette de sa bouche, je l’ai portée à ma bouche, j’ai pris mon briquet rouge, je l’ai allumée, je lui ai souri, et je lui ai dit : « si tu veux fumer, tu dois aspirer l’air que sort de ma bouche » . Elle était heureuse, parce qu’elle ne m’avait jamais vu fumer et savait que je le faisais pour l’amuser. Nous avons fumé cette cigarette ensemble, je lui prenais la cigarette de la bouche et elle de la mienne. Une fois, deux fois, nous nous amusions ensemble, les gens nous regardaient. Ensuite, elle m’a dit : « c’est un jour de soleil, pour que nous nous promenions dans la ville ? ». Nous sommes allées dans le parc du « Retire », le plus grand parc de Madrid. Il y avait des gens qui lisaient, qui couraient, qui parlaient, qui jouaient, qui se promenaient, qui regardaient les fleures. Nous nous sommes assises sur un banc et elle s’est allumée une autre cigarette. Je lui regardais et pensais que quand elle fumait rêvait de ses livres, de sa vie, et de notre histoire. Elle était très belle, et quand elle fumait, plus encore.

Quand nous dormions ensemble, chez moi ou chez elle, les matins je lui apportais le petit déjeuner dans la chambre : café, lait, biscuits, jus d’orange, pain, beurre, marmelade. Quand elle avait bu du café au lait et mangé quelque chose, elle cherchait une cigarette, elle avait un air très bizarre, ne disait rien, comme si elle était encore endormie, me regardait, me souriait. Je prenais le briquet et allumais sa cigarette, je voyais comme la fumée sortait de sa bouche, elle jouait, se réveillait et me disait : Bonjour, ma princesse, comment Ça va ? Je savais que la fumée de sa cigarette circulait dans son sang et elle pouvait parler, sourire, se doucher, s’habiller et aller au travail.

Petit à petit, j’ai commencé à fumer avec elle, surtout pendant les nuits, quand nous nous couchions ensemble, nous lisions un livre de Cortázar ou une poésie de Benedetti. Nous parlions de nos projets, de nos voyages, de notre vie ensemble. Nous discutions d’art, de politique et de littérature, « tu as une cigarette? Ou est le briquet? » Nous fumions ensemble, chez elle ou chez moi, nous étions heureuses.

Au début, j’ai commencé à fumer pendant les nuits, ensuite à chaque moment de la journée : les matins, les après-midi et les soirs. Je suis devenue une fumeuse habituelle, je ne fumais pas seulement pour le plaisir, mais aussi par le besoin. Si je n’avais pas de cigarettes je sortais pour les nuits pour les acheter, je pouvais supporter la faim, la soif, le froid, la chaleur, mais pas le manque de cigarettes.

Les années ont passé, et j’ai fumé par ennui, par bonheur, en pensant à quelqu’un ou à ma vie, pour attendre une visite ou un appel, pour commencer ou terminer un livre ou un chapitre, pour attendre la nuit ou le matin, pour digérer Ça que j’avais mangé, pour me promener dans la ville, pour regarder un paysage, un tableau ou une amie dans la rue, pour rêver une vie différente, par tristesse, nostalgie et mélancolie. Petit à petit mon corps s’est habitué à la fumée des cigarettes, j’avais besoin de fumer á chaque moment de la journée.

Maintenant, j’ai décidé d’arrêter de fumer. Ce n’est pas impossible, mas c’est difficile. Quelqu’un un jour m’a dit : « c’est plus difficile d’abandonner une mauvaise habitude qu’une grande passion ». Je pense qui il avait raison.

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